dimanche 18 novembre 2012

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En réponse à « Les clés de la crèmerie »,
par Lysiane Gagnon dans LaPresse

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Avant de parler de l'indigence intellectuelle des autres, Madame Gagnon, je me garderais une petite gêne, car votre jupon dépasse un peu.

Pour commencer, de nos jours, n'importe quel enfant d'école sait la différence entre 1k, 1 meg et un gig (respectivement : mille, un million et un milliard). 50 millions, Madame Gagnon, il y a plein d'hommes d'affaires qui gagnent plus que ça dans leur avant-midi. Alors n'essayez de nous faire pleurer pour des pinottes. Parlons plutôt d'Éducation.

Le carré rouge, Madame Gagnon, c'est un symbole. Un symbole que j'arbore fièrement pour marquer mon appartenance à un groupe. Au groupe des personnes qui considèrent que ça vaut la peine pour la société de donner une chance égale à tous ses enfants d'avoir accès aux études supérieures.

Vous vous offusquez pour quelques jeunes qui ont manqué des cours le printemps dernier, mais vous n'avez rien à dire à propos des milliers d'étudiants et d'étudiantes qui auraient dû renoncer à l'université par manque d'argent si le Parti québécois n'avait pas annulé la hausse des frais de scolarité. Et vous ne dites rien non plus à propos des milliers d'autres qui y auraient accès si on avait la gratuité scolaire.

La province compte beaucoup plus de contribuables que d'étudiants. Ce qui coûte plus de 2000$ à chaque étudiant revient à moins de 50$ à chaque contribuable. C'est le même calcul que pour la taxe santé. Si avec 200$ on ramasse 1 milliard, hé bien avec 50$ on ramasse 250 millions. Une simple règle de trois. Y êtes-vous allé à l'université vous Madame Gagnon ?

En tout cas, il me semble évident que Léo Bureau-Blouin en connaît beaucoup plus que vous sur l'université et je dirais même qu'il semble en connaître plus que vous sur la vie en 2012. Car, en vous lisant, je suis ramené dans le monde de mon enfance où il fallait apprendre le petit catéchisme par coeur et s'y conformer. Heureusement ce monde n'existe plus. Il a volé en éclat.

«People are just uptight because their kids are having fun, and they didn't have the same freedom, because they didn't take it, they just followed the lines laid down by their parents.» John Lennon

Ce monde dans lequel il faut se placer pour comprendre votre texte, il est en train de s'écrouler avec les coups de bélier de la Commission Charbonneau et les manifestations quotidiennes des milliards de personnes qui en ont assez des banquiers et de leur doctrine néolibérale bidon qui ne tient pas la route.

Le «droit de grève» des étudiants, des travailleurs ou de qui que ce soit, Madame Gagnon, c'est comme le droit à la «légitime défense», c'est un droit humain qui transcende les sociétés et les époques. Ce n'est ni à vous, ni à vos patrons, ni au gouvernement du Québec de décider qui dans le monde entier peut ou ne peut pas faire la grève. Si les personnes habitant un lieu ou vivant à une époque le peuvent, alors les personnes de tous les autres lieux et de toutes les autres époques le peuvent aussi. C'est ça la loi à partir de maintenant.

La mauvaise foi et l'ignorance crasse, Madame Gagnon, ce n'est pas de changer un chiffre de colonne dans le budget du ministère de l'Éducation, c'est vouloir manipuler l'opinion publique en lui faisant croire que ce sont les «carrés rouges» qui sont contre l'université. Ceux qui sont contre les universités de nos jours, ce sont les corporations qui veulent convertir la recherche fondamentale en recherche appliquée à sauver de l'argent dans leurs départements de recherche et développement et ce sont les politiciens corrompus qui sont prêt à leur livrer nos universités sur un plateau d'argent en échange de quelques enveloppes brunes.

La pire tristesse, Madame Gagnon, c'est de voir l'intelligentsia québécoise à plat vendre devant les banquiers et les militaires plutôt que debout en train de défendre ses enfants et son territoire.
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